L’éveil par la Caméra : Quand les jeunes racontent les Droits de l’Homme
Au Foyer des Jeunes des Marolles, un groupe d’adolescents a troqué les doutes de son quotidien pour des caméras, créant de courtes vidéos sur les Droits de l’Homme. Le projet, aussi improbable que louable, est né d’une vérité simple, que nous connaissons tous : les jeunes se tournent rarement de leur propre chef vers des sujets aussi sérieux.
C’est en partant de leur intérêt pour la vidéo que la MJ, avec un subventionnement européen, a réussi à leur faire embrasser cette thématique. D’abord perplexes, ils s’attendaient sans doute à tourner des clips musicaux, mais leur appréhension a vite fait place à l’engagement. C’est l’essence même du grand cinéma : transformer une idée abstraite en une réalité tangible.
Les deux premiers mois ont été une exploration de leur propre vécu. Loin des caméras, ils ont mis des mots sur ce qui les touche directement : les contrôles de police, la question du voile, les défis de l’école. Ils ont appris à faire la distinction entre le racisme et la discrimination, réalisant que certaines situations « normales » de leur vie, comme un contrôle de police sans raison, étaient en fait des atteintes à leurs droits. C’est cette prise de conscience, cette étincelle intellectuelle, qui a été le moteur de tout ce qui a suivi. Un grand film ne naît pas seulement d’un script, mais d’une idée, d’une vérité.
Une fois la théorie bien ancrée, ils sont passés à la pratique. Ils ont appris à manier une caméra, un micro et comprendre l’importance du cadrage. Les sujets de leurs vidéos sont des extensions de leurs propres vies : la police, le voile, le droit de s’épanouir, et l’école.
L’animateur, Bruno, un ancien cinéaste, a été leur guide, leur mentor. Il les a laissés trouver leur propre voix, leur propre récit. Ils ont recréé des scènes de leur vie, des interactions avec la police, et ont recueilli des témoignages poignants, des podcasts de jeunes filles sur le voile, ou encore des interviews d’anciens du quartier, des modèles de réussite qui ont pris leur envol.

L’impact de ce projet va bien au-delà des compétences techniques. Les jeunes ont appris à argumenter, à débattre, à penser collectivement. La diffusion publique des vidéos a été un moment de gloire et de fierté, les parents découvrant le sérieux de leur démarche et l’impact de la MJ.
Ce ne sont pas que de simples vidéos mais de véritables fenêtres ouvertes sur des réalités que d’autres jeunes pourront reconnaître en vue de combattre l’ignorance et donner des mots aux problèmes de chacun.
Ce n’est pas un simple atelier, c’est une démarche d’émancipation dans laquelle les jeunes sont à la fois réalisateurs, acteurs, et scénaristes de leur propre vie. Pour ces jeunes, le Foyer des Jeunes des Marolles est devenu un lieu où les contradictions sont non seulement possibles, mais encouragées, et où les questions de société peuvent être abordées de manière constructive et collective. C’est un projet sur la vie, sur la manière dont l’art peut être un puissant levier pour l’éveil citoyen.
